L’une des faiblesses du mouvement contre la crise climatique est, à mon sens, notre façon de présenter les choses comme si on n’avait le choix qu’entre tout ou rien.
Rebecca Solnit, dont nous avons déjà parlé ici, et Thelma Young Lutunatabua viennent de faire paraître une collection d’essais pour essayer justement de trouver un entre-deux qui n’est ni tout, ni rien.
Le livre, intitulé Not Too Late (qui est le nom, également, du projet associé au livre), a pour sous-titre : Changing the Climate Story from Despair to Possibility, soit « transformer le récit climatique du désespoir à ce qui est possible ».
(La traduction française de Not Too Late n’est pas encore disponible.)
Publié en 2023, Not Too Late a une approche semblable à celui de All We Can Save, édité par Dr. Ayana Elizabeth Johnson et publié en 2020 (et dont nous vous devons un billet ; c’est pour bientôt, promis). C’est-à-dire qu’il constate les choses telles qu’elles le sont, puis se concentre sur comment chacun chacune peut agir là où elle ou il se tient actuellement.
Les deux livres ne se soucient ni de savoir s’il est possible de « sauver le monde » (phrase totalement immobilisatrice, à mon avis) ni de décrire les menus détails des horreurs qui nous attendent. Leur approche est de nous ramener au moment présent et de nous rappeler que toute action qui va dans la bonne direction, aussi petite soit-elle, engendrera d’autres actions qui ferons avancer les solutions dont nous disposons déjà. Arrêtons de nous immobiliser de terreur. Agissons là où nous nous tenons — dans la joie et l’amour de l’autre.
adrienne maree brown, auteure, musicienne, podcasteure et doula, y est interviewée — elle est l’une des vingt et une personnes ayant contribué à cette collection — dans une conversation intitulée « L’imaginaire est un muscle ».
« Je pense que si nous libérions notre imaginaire, nous pourrions voir que nous sommes dans un lieu de surabondance où il y a déjà tout ce qu’il nous faut. »
nous dit-elle, page 151.
Elle poursuit, page 152, en disant :
« L’imaginaire est un muscle qui, pour beaucoup d’entre nous, risque de s’atrophier si nous ne l’utilisons pas, surtout sous la pression d’une peur constante. Souvent, la peur et l’imaginaire ne peuvent pas se trouver dans la même pièce. »
Pour se muscler l’imaginaire, lisez ! nous dit-elle.
L’entretien est très court mais bourré d’idées sur comment recadrer notre façon d’être dans le monde afin de s’atteler au travail de longue haleine que nous avons tous besoin de faire. Lisez-le pour apprendre ce qu’elle a à nous dire au sujet de l’eau ou même du désespoir. C’est tout simplement revigorant.
Parmi les autres contributeurs.ices à cette collection nous retrouvons Jade Begay, Leah Cardamore Stokes et Mary Ann Hitt (qui nous propose une nouvelle située dans un avenir proche et énergétiquement propre) sans oublier les belles illustrations de l’artiste militant David Solnit (frère de Rebecca).
Si vous avez besoin d’un coup de pouce pour retrouver votre équilibre face à cette période très difficile, si vous avez besoin de lire une liste — incomplète ! — des victoires du mouvement jusque-là ou si vous avez besoin de savoir si votre action vaut quelque chose, lisez Not Too Late.
Puis, continuez votre action.